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dimanche 27 juillet 2025

Loi Duplomb : signer une pétition n'est pas un acte de résistance

Sans revenir sur l'agitation médiatique autour d'une loi scélérate adoptée le 08 juillet dernier à l'Assemblée nationale, il convient de s'interroger à la fois sur la mobilisation citoyenne à travers la signature d'une pétition cristallisant des inquiétudes légitimes sur la gestion de l'eau, l'usage des néonicotinoïdes et leur impact sanitaire, ou au sujet des fermes-usines, et sur sa capacité à modifier un tant soit peu le sort réservé à l'environnement et aux possibilités de protections durables des populations. Il ne faut pas se leurrer, signer une pétition depuis son ordinateur ou son portable ressemble à une forme de résignation face à des adversaires bien plus motivés parce qu'ils ont à leur disposition un modèle économique cadenassé, monolithe dans leur monopôle.

D'emblée, l'engagement pour l'écologie, qu'il soit citoyen ou militant, qu'il ne faudrait pas qualifier de radicale afin de ne pas effrayer les plus pudibonds, s'apparente à un combat permanent eu égard aux oppositions décrétées par on ne sait quelle nécessité de productivisme et de rentabilité soutenus de façon fallacieuse par un éventail très large d'opportunistes affairistes et d'irresponsables politiques. Puisque le terme de combat a été avancé, il convient alors de décrypter quelques exemples d'un éventail plus large d'opposition, affirmée mais non violente. 

Etonnement, le premier de ces combats consiste à réclamer auprès des élu.es la stricte application de la loi et du code de l'environnement (voir être fidèles à la Charte de l'environnement inscrite dans la Constitution) et d'attendre d'eux ou elles qu'iels agissent contre des actes illicites voire écocidaires. Alors même que ces politiques ne cessent de s'identifier à l'Etat de droits, quand bien même ce droit est adopté par le législateur et promulgué par le Président de la République, et donc qui ne dépend pas de leur fonction mais que l'on exige d'eux son application, il n'est pas exagéré d'affirmer que l'énergie déployée dans les cas d'abandon dans leur rôle civique, relève du parcours du combattant : est-ce que la signature par le maire d'un permis de construire pour une nouvelle porcherie est un acte contraire à l'intérêt fondamental de la Nation ? Il faut croire que oui, à voir l'état des plages en Bretagne et notamment à Douarnenez mais qu'on continue à souhaiter l'extension en facilitant leur implantation par un assouplissement des règles environnementales, octroyée par les Préfets. Est-ce que la signature d'une convention entre une commune et un entrepreneur pour l'édification d'un ouvrage urbain exigeant une ICPE (Installation classée protection de l'environnement) comprenant des déchets, est contraire à l'esprit de l'intérêt fondamental de la Nation ? A constater le type et le volume des polluants, certainement. Est-ce que la réintroduction d'un néonicotinoïde (acétamypride) est contraire à l'esprit de la Charte de l'environnement qui proclame la préservation de la biodiversité ? La réponse est connue. 

Alors, que peut transformer une pétition, même populaire, face à l'insignifiante volonté des républicains à s'accorder à leur propre texte constitutionnel ? Le relais opportuniste de la gauche parlementaire marque bien la faiblesse de leur représentativité et leur incapacité à fléchir l'orientation des partisans de la "loi Duplomb". La gauche n'a plus qu'à supplier le Président français pour saisir l'Article 10 de la Constitution dans le but de provoquer un nouveau débat parlementaire... sans effets pour la suite. Le modèle parlementariste marque une nouvelle fois ses limites.

Nonobstant ce fait, un arsenal de contre mesures encourage, de surcroît, à la désertion des élu.es face aux enjeux écologiques. Si la France reste une championne dans l'empilement des lois, elle fait de leur dérogation une norme quand il s'agit de destruction d'espèces protégées ou d'abattage de corvidés. Mieux, on octroît à ces représentants une sortie de secours à travers une nomenclature déviante, le sésame de toutes les facilitations d'urbanisme : "Eviter, réduire, compenser", aux oubliettes la "Zéro articifialisation nette" remplacée par la compensation. Aucune pétition ne viendra modifier cet état de fait. Au fond, ce genre de réaction s'apparente davantage à une distraction citoyenne.

De plus, l'ampleur prise par cette pétition a un précédent. "Le cap du million de signatures a été franchi haut la main à la fin 2019". Voilà ce qu'annonçait le mouvement des coquelicots sur son site il y a 5 ans, concernant leur propre pétition. Les animateurs du collectif titraient : "Et maintenant, que va faire l'Etat ?" Eh bien : la loi Duplomb, le renforcement du lobbying de la Fnsea et la structuration du syndicat d'extrême droite que représente la Coordination rurale, porter davantage le discrédit sur les écologistes, la création du dispositif "demeter" orchestrée par la Fnsea depuis la Place Beauvau, le peu d'empressement pour condamner les pressions exercées sur le personnel de l'OFB et pour trouver les responsables des dégradations de leurs locaux, les désengagements et les relâchements divers et variés (mégabassines notamment). L'Etat français et E. Macron ont fait peu de cas pour ce genre d'apostrophe par le passé, est-on convaincu d'une volte face pour cette nouvelle pétition ?

Occupation de la Draf Bretagne par des apiculteurs et des militants dont dédé l'Abeillaud (David Derrien). Mars 2012

D'autre part, l'outil numérique qu'utilise le pétitionnaire a un effet délétère car il participe à l'abandon de la rue, haut lieu de toutes les insurrections et des contestations populaires, et il renvoie aux souvenirs ce que "faire corps social" signifie. L'inquiétude des parents sur le barrage sanitaire partiellement escamoté par cette nouvelle dérogation ne souffre d'aucune contestation à l'endroit de la santé de leurs enfants. Néanmoins, l'efficacité des mobilisations de rues, d'intrusions citoyennes ou d'occupation de lieux symboliques ont démontré leur efficacité à faire plier les décideurs de tout acabit. Les Anarchistes le savent mieux que qui compte dans un autre domaine : les bouleversements sociaux en faveur du peuple passent par la Révolution et non par les urnes. 

Au final, serions-nous aujourd'hui incapables d'imaginer 2 millions de personnes défilées dans les rues des villes et des villages, côte-à-côte, dans un pacifisme absolu au cours d'une révolution douce, parce que justement, les enfants accompagneraient leurs parents ? Même Retailleau n'exigerait pas la charge des forces de l'ordre contre ces jeunes agitateurs qui se rejoigneraient à propos du maintien du Vivant. 

Actions des faucheurs volontaires. Cecab à Saint Sylvestre. Mai 2011

https://www.dailymotion.com/video/xim0ak

Intrusion citoyenne, castorama de Brest. Etiquetage de bidons "round up". Juin 2013

https://vimeo.com/manage/videos/68953034/player



dimanche 13 juillet 2025

Augmentation du budget des Armées : "Ne comptez pas sur nous"

Au lendemain de l'allocution disproportionnée du Chef des armées de la République française, l'excessif dramaturge Emmanuel Macron, à propos des logiques d'augmentation du budget des Armées, le 14 juillet, jour de fête militaire pour les patriotes, est un merveilleux jour pour affirmer que l'Etat ne pourra pas compter sur la mobilisation et l'adhésion de tous les Français. Et sans les représenter ni être leur porte-voix, sur celles des Anarchistes, réfractaires à l'armement massif des pays. 

D'après Emmanuel Macron, qu'est-ce qui justifie "un effort nouveau et historique" de doublement du budget à horizon 2027 et le porter à 64 milliards d'euros ? D'après lui "La Nation est confrontée à toutes ces menaces hybrides (...), les conflits sont multiples, multi-champs". Jusqu'à preuve du contraire les cyber-attaques orchestrées par des pays hostiles (Iran, Chine, Russie) n'ont pas besoin du renforcement de moyens militaires sur le sol français. En quoi le système sol-air moyenne portée terrestre (SAMP/T), ou tout autre type de missiles, déployé sur le territoire national, apporterait un élément dissuasif à toutes manoeuvres de déstabilisations informatiques ? Tant que la "guerre" menée sur les réseaux sociaux se limite à ces espaces, très souvent contestables, le rétablissement d'un service armé à l'intention des jeunes français, ne viendrait pas contrecarrer leurs répercussions. D'ailleurs, on s'inquiète moins depuis plusieurs années de l'espionnage informatique des Alliés, et à leur tête les Etats-Unis (souvenons-nous également de l'embarras diplomatique dans l'affaire "Pegasus" qui a impliqué le Maroc), qui pourtant serait aussi préjudiciable à la souveraineté nationale dans des domaines telle que l'industrie de l'armement. Face à ces infiltrations malveillantes, ont-ils envisagé de croître le budget des armées ? En tous les cas, on apprend qu'il faut se prémunir contre les menaces terroristes. N'est-ce pas un domaine réservé au ministère de l'intérieur ? 

Ensuite, le Chef de l'Etat souligne "La permanence d'une menace russe aux frontières de l'Europe." Incontestablement, les velléités guerrières de Poutine "préparées, organisées, durables", pèsent sur l'existence des peuples de l'est de l'Europe et que très certainement l'Ukraine s'oppose héroiquement aux coups de boutoir russes en lieu et place des pays de l'ouest du même continent. Mais si le soutien armé apporté aux civils ukrainiens en uniforme est existentiel pour un pays qui a vu naître Makhno, ne fallait-il pas, en l'état actuel des circonstances, un engagement proportionné et provisoire contre l'agression russe ? La fabrication de l'obusier "Caesar" et des obus de 155 mm compatibles avec l'armement à la disposition des ukrainiens, à seule destination de leur défense, ne répond-t-elle pas, de façon maîtrisée, à un conflit qui ne doit pas s'étendre au-delà du confin des oblasts de l'est de l'Ukraine ? A priori, non, car l'industrie de l'armement a toujours besoin de plus de croissance pour assurer une économie pérenne pour son industrie, rentable pour ses investisseurs (la France est la seconde nation exportatrice d'armes dans le monde) et que l'armée française, même si elle reste une grande muette, est nostalgique de sa militarisation antérieure à grande échelle. Pendant plusieurs décennies, les Etats-majors ont fait le dos rond en voyant leur arsenal diminué. Avec la guerre en Ukraine, basé sur ce prétexte injustifié, il est venu le temps de rouvrir des casernes ! On a besoin de "gros effectifs" pour gonfler les cimetières militaires. Nécessité ne fait pas loi, à moins qu'ils préparent l'opinion publique à l'expédition de troupes à l'extérieur de la France.

En évoquant l'armée, un discours très récent, tenu par d'anciens officiers ou des commentateurs confortablement installés sur leur siège, entendu sur les plateaux de chaînes d'informations en continu, commence à émerger : celui de la légitimité qui viendrait supplanter la légalité. Autrement dit, le droit international sur la guerre pourrait être ignoré ou écarté quand la supposée menace nuirait à des intérêts vitaux. Ce discours est à surveiller de près parce qu'il viendrait s'ajouter à la panoplie des arguments de l'extrême droite pour affirmer un Etat toujours plus autoritaire, déjà parce qu'il est mis en application par Israël, pays prétendument démocratique, avec son opération militaire spéciale dans la bande de Gaza*.

A vrai dire, tout ceci réside dans la seule volonté de renforcer l'image auprès de l'étranger d'une puissance militaire qui s'est affaissée autant dans ses effectifs et ses moyens, qu'à travers même ses derniers théâtres d'intervention comme au Mali. Parce que en quoi est justifié le nouvel effort budgétaire de l'armée quand la France dispose de la dissuasion nucléaire ? Sur terre comme en mer ? Ce dispositif stratégique, et même si on peut se positionner contre sa légitimité gaulienne, suffit à annihiler toutes tentatives d'agressions militaires, même russes (coût estimé de la dissuasion : 5 Milliards/an). 

Il n'est pas de hasard quand la priorité pour les Anarchistes réside dans l'anéantissement du capitalisme (y compris de sa branche de l'armement). Pour la simple et bonne raison que l'écroulement de ce système prédateur viendrait égruger la pauvreté qui elle aussi augmente en France (plus de 10 millions de personnes en métropole, hors Dom-Tom) sans contre-mesures efficaces : quand avons-nous entendu pour la dernière fois les dirigeants politiques français s'exprimer sur ce sujet et instaurer un plan Marshall ? Eradiquer la misère, c'est éradiquer la guerre.

Non, M. le Président, vous ne pourrez pas compter sur nous, car jamais l'Anarchie cédera à la tentation dévastatrice de la militarisation d'une société. Non, M. Le Président, pour être libre, il ne faut pas être craint, il faut être aimé.











* Les standards internationaux proclament que la guerre est la confrontation entre deux ou plusieurs armées. D'après moi, le Hamas n'est pas une armée "conventionnelle". C'est une organisation politique et religieuse armée. C'est un groupe terroriste. Il n'y a pas de guerre à Gaza, plutôt un acte d'extérmination volontaire, en utilisant par exemple la famine comme moyen de pression ignoble, qui s'apparente à un génocide. Il est également difficile pour moi d'écarter l'avis que le Hamas utilisait la population gazaouie comme bouclier humain. 

Images : facebook "socialisme libertaire" et collectif régional anti-armement et militarisme




L’émancipation des esclaves noirs aux États-Unis : un exemple en trompe-l’œil. Part. 4

L'émancipation. Intro et première partie : naître à soi-même https://dderrien.blogspot.com/2025/10/lemancipation-intro-et-premiere-parti...