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vendredi 17 octobre 2025

Pauvreté. La société dans son entier est responsable

« La misère n’est pas une loi de la nature, c’est une honte de la société. »

— Louise Michel, discours à la salle Favié, 1880.

Combien il paraît révoltant et nauséeux de rappeler, en cette journée du 17 octobre, dédiée au « Refus mondial de la misère », ce chiffre de la pauvreté en France : 10 millions. Dix millions de personnes vivent en deçà du seuil de pauvreté fixé en France à 965 euros (échelle de l'Observatoire des inégalités, chiffre de 2022). À cette masse invisibilisée, on pourrait ajouter les foyers qui vivotent avec un Smic*, dont le sort n’est pas plus enviable mais qui perpétue le principe de pax civilis, assurant aux classes supérieures une existence bien plus confortable et, par ricochet, une indifférence quasi systématique au sort des plus démunis.

Car en effet, si la pauvreté ne se contente pas de stagner dans une statistique, elle se traduit par une précarité quotidienne, une aumône dans les centres caritatifs, mais surtout par une déchirure sociale, subie à travers l’isolement et l’amoindrissement de la capacité à s’accrocher à une cordée toujours plus distante, toujours plus encline à accumuler biens et produits financiers. Comme si l’on percevait cette misère, mais qu’au lieu de l’éradiquer, on préférait s’en éloigner, feignant de l’ignorer par peur d’un déclassement.

S’il persiste encore un positionnement politique, il ne change rien à cet état de fait. À n’en pas douter, il existe une hystérie collective à se concentrer exclusivement sur l’accumulation de capital, de biens matériels ou de patrimoine. Cette frénésie détourne toute volonté d’éradiquer les injustices sociales très souvent engendrées par ce système et, paradoxalement, renforce les garanties pour l’oligarchie bancaire, celle-là même qui n’offre aucun recours pour une société plus harmonieuse.


Certains avanceront, pour se dédouaner, que leur solidarité envers les plus précaires s’exprime à travers un pacte social fondé sur le prélèvement des taxes et le financement de prestations sociales. Mais ce discours de façade sert surtout à légitimer le système libéral, à cautionner un capitalisme qui n’a jamais favorisé l’essor d’un modèle de justice sociale ou de préservation des ressources naturelles. Il faut le rappeler : le capitalisme dépend des inégalités, de la précarité de genre, de zones de main-d’œuvre à bas coût et de l’exploitation insatiable des ressources naturelles. Sans ces moteurs, son économie s’essouffle et son règne technostructuré s’érode.

Combien sont-ils, parmi les partis politiques et leurs sympathisants, à vouloir combattre radicalement le capitalisme ? Peu, car beaucoup en tirent profit via des emprunts sur les marchés financiers, et l’État reste le premier exemple. Même régulé, le capitalisme ne change rien à la nature pervertie du système : le rachat d’actions par une entreprise, par exemple, rend artificiel le cours des actions et manipule l’optimisation des bénéfices. Il n’est donc pas surprenant que la pauvreté persiste, voire s’accroisse, en France.

Doit-on la subir pour en connaître les effets délétères ? Apparemment oui, à en juger par le peu de cas accordé aux personnes, quels que soient leur âge, leur genre, leur lieu de vie, ou leur situation fiscale, toutes confinées à l’isolement. Une journée dédiée à la misère est déjà une journée de trop et reste, dans tous les cas, une journée vaine. Les médias, politiques et économistes s’inquiètent davantage du sort des plus riches, s’étranglant presque à l’idée d’un effort fiscal à leur encontre. Pendant ce temps, la question de la pauvreté, et particulièrement la journée du 17 octobre, est totalement absente de la couverture médiatique.

Quelles solutions alors pour éradiquer la pauvreté ? D'après mon point de vue, il n’y en a qu’une : celle explorée par Murray Bookchin, militant et essayiste libertaire américain, à travers l’écologie sociale, la démocratie directe et la sortie du capitalisme. Est-ce une utopie ? Une hérésie ? Certainement, à voir le niveau jamais atteint d’accumulation de richesses ou d'épargnes dans ce pays. Bookchin a raison : avant de parler d’écologie, il faut se libérer de toute forme de domination, et en premier lieu de celle de l’argent.

* En 2023, environ 3,1 millions de salariés du secteur privé touchaient le Smic.



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