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mercredi 3 décembre 2025

L’émancipation des esclaves noirs aux États-Unis : un exemple en trompe-l’œil. Part. 4

L'émancipation. Intro et première partie : naître à soi-même

https://dderrien.blogspot.com/2025/10/lemancipation-intro-et-premiere-partie.html

L'émancipation. Partie II : le combat des femmes et du peuple


L’émancipation collective et politique : le destin d’un peuple. Troisième partie


L’émancipation des esclaves noirs aux États-Unis : un exemple de liberté en trompe-l’œil

1. Une liberté proclamée, mais confisquée

L’émancipation, telle qu’elle fut proclamée en 1863 par Abraham Lincoln, marque sans doute l’un des tournants les plus marquants de l’histoire américaine. Mais cette proclamation, si elle abolit juridiquement l’esclavage, n’abolit pas pour autant les chaînes morales, sociales et économiques qui liaient encore des millions d’hommes et de femmes à la domination blanche. Comme souvent, la liberté fut décrétée avant d’être vécue.

L’histoire de l’émancipation des esclaves noirs américains ne raconte pas seulement la fin d’un système inhumain ; elle révèle aussi la violence d’un ordre social qui se recompose pour perdurer. La guerre de Sécession, que l’on veut croire libératrice, fut d’abord une guerre économique et politique. L’émancipation, instrumentalisée par le Nord, servait autant à fragiliser le Sud esclavagiste qu’à redéfinir le cadre d’une Union fédérale que l’on voulait indivisible.

Dans son livre "Désobéissance civile et démocratie", Howard Zinn aborde l'émancipation des esclaves noirs américains en soulignant que l’esclavage n’a pas été renversé sans agitation, sans une extrême agitation. Il insiste sur le fait que la fin de l’esclavage et l’avancée vers l’égalité raciale ont été le fruit de luttes et de résistances, souvent menées par les esclaves eux-mêmes et par des mouvements populaires.

Source : Révolution permanente. Auteur inconnu

2. Les chaînes invisibles de la dépendance

Pourtant, au-delà de cette logique institutionnelle, des milliers d’anciens esclaves crurent réellement à la promesse de liberté. Ils avaient entendu les mots de Lincoln comme une réparation morale, un commencement. Très vite, à leurs dépends,  ils découvrirent que la liberté ne signifiait pas l’égalité. Les plantations réduites donnèrent naissance au métayage, autre forme d’asservissement économique où les travailleurs noirs restaient dépendants du propriétaire blanc. L’école publique leur fut souvent refusée, le droit de vote contourné, et la ségrégation érigée en principe d’ordre. 

L’émancipation, ici encore, se heurtait à la frontière invisible de la peur et du privilège. Le 13ème amendement abolissait l’esclavage, mais tolérait le travail forcé comme punition judiciaire. Ainsi naquit un système pénitentiaire qui prolongeait l’exploitation sous une autre forme : la servitude légale des condamnés noirs.

3. De la liberté formelle à l’émancipation intérieure

Frederick Douglass, ancien esclave devenu orateur, l’avait compris avant beaucoup : “Ce n’est pas la liberté qui élève l’homme, c’est l’usage qu’il en fait — et les conditions dans lesquelles il peut l’exercer.” C’est pourquoi il milita pour l’éducation, pour la conscience, pour une émancipation intérieure avant toute chose. L’instruction devenait l’arme la plus redoutable contre l’ignorance, donc contre la servitude.

4. L’émancipation comme conquête et non comme un don

À travers ces luttes, l’on comprend que l’émancipation n’est pas un cadeau de l’État. Elle est toujours une conquête, souvent douloureuse, parfois sanglante, mais jamais docile. Elle exige de l’être humain qu’il se dresse, qu’il pense et qu’il agisse en dehors des cadres établis — ce que les anarchistes ont toujours pressenti.

L’émancipation des Noirs américains, comme celle de tout peuple opprimé, rappelle que la liberté sans égalité n’est qu’une façade. Et que l’égalité sans fraternité devient vite une contrainte. L’émancipation, véritablement, ne s’impose pas d’en haut : elle émerge du courage d’en bas, de cette volonté inébranlable de ne plus subir.

5. Une leçon pour tous

C’est pourquoi, des champs de coton du Sud aux usines du Nord, des voix se sont levées pour dire que l’homme libre n’est pas celui que l’on libère, mais celui qui se libère.

Et cette leçon vaut pour tous les peuples, de l’Amérique noire à la Bretagne, de l’ouvrier à la femme, de l’enfant à l’adulte : l’émancipation n’a de sens que si elle est Internationale.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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